Alain Suied

Poète de la lucidité humaine,
et de l’identité juive

Ce que je veux dire, c’est le poème qui me l’apprend. (Alain Suied).

« Vous écrivez au cœur du langage - au cœur du creux, en fuite, au cœur « manquant » et qui cependant n’en finit pas de battre, tout bas, tout bas, obsédant ».

« Comme Paul Celan, vos poèmes évoquent ces petits cailloux que l’on dépose sur les tombes. Graviers ramassés sur les chemins du temps, de la douleur, des nuits, mais où luisent des grains de jour, des promesses de sens en perpétuelle et secrète floraison ». Sylvie Germain, Lettres à Alain Suied.

Une voix prophétique d’aujourd’hui

Alain Suied une des voix poétiques d’aujourd’hui, et éminent traducteur, est aussi un penseur de la judaïté, l’un de ceux qui nous mettent en garde contre ce renouveau rampant de l’antisémitisme dont il démonte les rouages jusqu’aux racines chrétiennes.

Sachons qu’il est né à Tunis, en 1951, et qu’il vit à Paris. Il porte en lui les murmures, le jasmin et le savoir de l’ancienne communauté juive de Tunis.

Il se tient en l’écart des cénacles et des réseaux parisiens, et il dérange la bonne société littéraire quand il dénonce les récupérations faites sur la pensée de Paul Celan, lui qui a écrit le lumineux « Kaddish pour Paul Celan ». Il dénonce la pensée fascisante d’Heidegger, la lâcheté silencieuse parfois aussi de la communauté juive face à la montée des périls aussi bien d’une certaine extrême-gauche que de l’extrême droite négationniste.

Cette folle espérance de l’utopie de l’être, de l’autre et de la transcendance, le porte à se battre et à écrire envers et contre tout, même si les maisons d’édition se ferment devant lui.

Alain Suied se veut maintenant avant tout un Poète juif et fier de l’être.

« NE PARLONS PLUS DES JUIFS : PARLONS AUX JUIFS! », proclame-t-il.

Il fut très tôt dans sa vocation poétique : à 15 ans ami d’André Frénaud, et à 16 ans déjà publié par la revue « l’Ephémère » de Paul Celan et d’André du Bouchet, qui auront du mal à croire que cet adolescent qui sonne à leur porte est l’auteur des poésies reçues par la poste.

Il fut cet enfant-poète qui stupéfia ses grands ainés. Dans une lettre à Yves Bonnefoy il dit ceci :

« Je ne suis plus l’enfant-poète d’alors mais j’ai maintenu le travail du Poème dans l’absence de reconnaissance dans l’indifférence du monde abasourdi de sa propre violence. Et je peux dire que le « lot » du poète est toujours de « paraître l’étranger » : je déchiffre la Shekinah et je formule énigme et présence. »

On comprend donc qu’il soit l’ami de Meschonnic, et de bien d’autres poètes justes et non inféodés à la mode parisienne.

Il est lui aussi « un poète métaphysique », comme il qualifie Frénaud et il chante dans l’arbre de sa culture juive.

Pour lui « une éducation juive passe par la « Genèse » source même du poétique.

« La parole humaine se tourne vers l’Autre et affirme que le dialogue est la vérité (fuyante) de l’âme humaine…

C’est un nouvel état de conscience de l’humanité – le refus du « sacrifice humain, la prise en compte de la « transmission ». La saisie du destin humain, limité par sa condition rude, fragile mais qui peut et doit se vivre dans le respect d’autrui et la victoire sur nos conflits intimes et sociétaux…

Cette « leçon » est toujours en cours… C’est aussi ma conception du poème : affrontement avec le réel et non – comme on le croit - fuite dans l’imaginaire »

Il dénonce l’état actuel vidé de sens de la poésie française, exsangue et mathématisée, oubliant et niant ses racines judéo-chrétiennes.

Mis à l’écart des réseaux du pouvoir intellectuel qui s’auto-entretiennent, il voit s élever une écriture de la récupération de certaines formes de la mystique juive, mais en niant le juif.

Lui est inspirée par la Sherinah et non par une quelconque « présence », floue et consensuelle, image flottante du sacré.

Alain Suied se réclame de la pensée juive, de la mystique juive, d’une poésie issue de la Génèse, « génésiaque » donc, et d’une profonde culture sépharade.

Il se sait maillon essentiel de la transmission, de l’héritage de la création du monde et du verbe.

Il dit « le ciel est le tissu de ton cœur ».

Se questionnant sans trêve sur le rapport de la parole et de son objet, il veut croire à l’Autre, à l’Etranger.

La lucidité jusqu’à la blessure

Il est lucide au monde, jusqu’à la blessure et il combat ce qu’il appelle « la « rage narcissique » de nier l’être juif, l’identité juive, la loi.

Ce meurtre rituel par le basculement chrétien de Saint-Paul est pour lui la suppression du père pour détourner son héritage spirituel. Alors le juif sera à jamais la failli, le Judas. Il faut le nier mais aussi couper tous les liens possibles de transmission, donc le dénigrer à jamais.

La poésie juive d’abord ancrée dans les psaumes, s’est forgée dans l’Exil et la brassage.

« Elle est fidélité et ouverture. Une flamme de shabbat, un cri intérieur, un appel à l’espoir et à l’Autre… » nous dit Alain Suied.
« La poésie est une voix intérieure et elle est écoute aussi… C’est un travail qui ne finit pas, qui sait que tout est dans l’échange et le partage…Les « voix secrètes » souterraines de la poésie savent parler au cœur. »

Ce défi l’isole mais nous le rend proche et cher.

Par les mots qui servent d’appeau à « une invisible présence », les rêves de la poussière se déchiffrent enfin. Et par ce ressassement de questions des fous et des poètes une présence sera bien obligée de se montrer.

Et les ombres capturées parlent entre elles de ce temps qui n’est plus.

Lumière initiale - dont toute poésie est l’intraduisible rappel.

Alain Suied est nommé "poète des origines". Non pour établir un royaume ou une histoire, mais pour restaurer l’arche du langage.

Celle qui traverse le désert, et qui sait l’énigme. Celle qui émet « la première lueur inconnue », qui nous fera exister. Claude Vigée dit ceci de lui:
« PORTE-LUMIERE dans le monde voué à la violence, livré à la nuit des hommes et au silence des choses obtuses qui nous assiègent.

Tenez bon dans votre monde obstiné sans renoncer à demain nourri par un hier d’où jaillit la sève de notre âme future ».

Il faut des êtres comme Alain Suied pour tenir bon. Pour s’en tenir à l’essentiel et espérer un jour être essentiel.

Gil Pressnitzer

Choix de textes

L’AVENIR A LES YEUX OUVERTS

Rien n’est plus cher aux hommes que leurs illusions.

Les farces et les forces du Narcissisme se dévoilent plus aisément dans certains « cercles » poétiques et dans les attitudes, positions et postures de certains « poètes » - capables de « gérer » leur "image mais rarement de déceler ou de régler les questions d’identité et de simple vitalité qui se posent à la poésie aujourd’hui, un « genre » qu’ils ont parfois contribué à reléguer à la mode de « l’absence de sens » des années 1960 ou au service d’idéologies surannées et cruelles.

Le Poème a ses voies propres, sa pensée et surtout sa...liberté - qui sait rire des miroirs complaisants.

Mon travail de poète consiste à tenter de trouver ces autres voies,

ces autres chemins intérieurs.

Perdre ses « illusions »? Briser les « idoles »? Telle est la nécessité poétique aujourd’hui pour que survienne, à nouveau et autrement, le risque fertile de l’aventure poétique.

L’Avenir a les yeux ouverts.

Il ne faut pas sous-estimer ses « possibles ».

Il en va de même pour la voix ténue, souterraine, vraie du Poème.

Jacob

chanson au bord des âmes

L’amour, ce n’est pas seulement aimer

C’est être happé soudain par un ange

Qui vous élève et vous tire vers le haut

Comme au-dessus de vous même

Comme au-delà de votre histoire

Et le désir n’est plus le désir

Et la pesanteur n’est plus la pesanteur

Et l’incertitude n’est plus l’incertitude

L’amour ce n’est pas seulement aimer.

Etre aimé, ce n’est pas seulement l’amour

C’est être reconnu soudain par un regard

Qui vous enveloppe et vous guide vers vous-même

Comme au-dessus de notre condition

Comme au-delà de nos pulsions

Et l’égarement n’est plus possible

Et la trahison n’est plus possible

Et l’aliénation au passé lointain s’efface

Etre aimé, ce n’est pas seulement l’amour.

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LA PAROLE VIVANTE

Les mots ne montrent pas

ils voilent :

un regard,un seul

est plus profond

un regard plonge

dans le passé le plus lointain

dans le rêve le plus certain.

Les mots ne répondent pas

ils frappent :

un cri,un seul

est plus terrible

un cri rappelle

l’amour le plus profond

l’espoir le plus long.

La parole éclaire

la parole donne la joie

la parole vivante brille dans les cœurs.

ADAM

Homme, où es-tu?

A l’aplomb d’un rêve?

A la croisée des éléments?

Au-dessus du monde?

Homme, où es-tu ?

Sur la ligne parallèle

de ton propre secret?

A la perpendiculaire

de l’espace sans limites?

Homme, où es-tu ?

JACOB DANS LA NUIT

I

GENERATIONS

Sur l’échelle de Jacob

j’ai vu les générations

monter, j’ai vu les générations

descendre.

Nous sommes différents

nous sommes semblables.

Nous scrutons les cieux

nous détournons le regard.

Mais le muscle vivant

attend la blessure.

Sur l’échelle de Jacob

tu montes, tu gravis

les degrés du rêve

et au loin, au loin

le monde n’est plus qu’un point

à l’horizon de la terrible Promesse.

II

COMBAT

L’étranger qui te défie

murmure à ton oreille

tes plus sombres secrets.

Face à face

ose le regarder

dans les yeux, ose parler

dans sa langue oubliée

ose livrer ta force

à votre strict combat.

Rentre dans la Lumière.

Tu sais bien que l’aube

aura le visage

de la terrible vérité.

Corps flottants

A G.C.

I

Dans mon regard, tu as choisi

d’arpenter le chemin effacé

tu as choisi de retourner

sur les traces du fantôme blotti

au cœur de ton désir.

Dans mon regard, tu as deviné

l’exil de la terre natale

tu as deviné le secret tourment

du fantôme: lâcher prise

et te confier à mon amour.

Dans mon regard, tu as revécu

toutes les douleurs des générations

tu as revécu tous les désirs

de fuite - et soudain

tu ouvres les yeux sur le monde innocent.

II

Le miracle écorné de l’humain

respire encore en toi, regarde

à travers toi, vibre avec toi.

Les morts te parlent: réponds!

La même chair, vous êtes la même

poussière, le même cri du vouloir-vivre

et du vouloir-mourir, l’offrande

du même regard.

Entre-mêlés, entre-dévorés

encordés dans la spirale

nous ignorons où cela mène

où cela monte.

Nous ignorons où commence

où finit la rose de l’être.

Nous sommes les corps flottants

dans la rétine de l’univers

nous sommes le parfum d’une racine arrachée.

Moi aussi, je regarde à travers toi

et à travers toi, le monde me voit.

III

De génération en génération

souffle-t-il sans retrait

le vent de l’effroi?

Parfois j’entends sa note pointue

sur les environs d’un visage.

Ton corps ploie sous son appel

comme un enfant découvrant la nuit.

Ton corps se tourne vers sa voix

comme un vieillard reconnaît un fantôme.

O vent, je sais ta douleur glaciale

je sais ton fardeau

de terribles violences, de cruelles séparations

O vent, tu fuis l’atroce destin humain!

De génération en génération

souffle-t-il sans retour

le vent de l’espoir?

Parfois j’entends sa note émue

sur les surfaces d’un regard.

Ton corps s’élève vers son appel

comme un enfant retrouvant l’abri.

Ton corps s’offre à sa voix

comme une amoureuse reconnaît sa moitié perdue.

extrait d’un travail en cours

Abolir

I

Dans la tornade, sous le vent

dans la spirale, sous le joug de ta mort,

j’ai tendu les bras

vers toi, j’ai crié ton nom

en vain ou seulement pour

accompagner le récit de ton départ

l’inaudible mélodie de ton cœur

épouvanté.

Sans traces, sans paroles

ta place vide occupe mon regard

et ta vie perdue s’enracine

àa ma propre histoire.

Nul ne te voit, nul ne sait

que tu joues de ton absence

pour abolir les ultimes distances

qui nous séparaient. Tu poses

la main sur mon épaule.

Je me retourne, tu disparais.

Transparence du souffle!

Tu m’élèves dans la tornade du vivant.

II

Dans la tornade, sous le vent

dans la spirale, sous le joug

de ton absence, j’ai tendu les bras

vers ton image, crié ton nom

en vain ou seulement pour

alléger le fardeau de ma détresse

la secrète évidence de mon cœur

entravé.

Sans traces, sans paroles

ton passé perdu occupe ma mémoire

et ta place absente se confond

à ma propre patience.

Nul ne sait, nul ne voit que tu joues de ton silence

pour abolir les ultimes distances qui nous séparaient.
Tu poses

la main sur mon épaule.

Je me retourne, tu apparais.

Transparence du rêve!

Tu m’élèves dans la tornade du vivant!

III

Dans la tornade, sous le vent

dans la spirale, sous le joug

du vivant, j’ai tendu les bras

vers ton absence, crié ton nom

en vain ou seulement pour

accompagner le récit de ta perte

l’inaudible mélodie de ton cœur

évident.

Sans traces, sans paroles

ton amour entier occupe mon histoire

et ta vie retrouvée s’enracine

à mon propre regard.

Nul ne voit, nul ne sait

que tu joues de notre séparation

pour abolir les ultimes distances

qui nous différenciaient. Tu poses

ton absence dans ma main.

Je te saisis, tu disparais.

Transparence de la matière!

Tu m’élèves dans la tornade de la présence!

QUI MANQUE A LA PAROLE

Oublier, c’est aimer :

je t’oublie pour te retrouver

tu t’éloignes pour que revienne

le mystère de ta présence

je te parle et tu me parles

pour que s’échappe de nous

ce qui manque à la parole.

Oublier? Le corps n’oublie pas

ses blessures, ses éveils, ses désirs

mais veut-il se souvenir

de leur secrète source?

Oublier, c’est aimer:

c’est se fondre

au diapason des jours

à la mélodie des espaces

c’est accepter de ne plus savoir

pour connaître

et de ne plus connaître

pour exister.

Oublier, c’est aimer

SANS PREUVES

Les mots qui ne sont pas proférés

les mots qui ne sont pas inventés

d’où vient leur force, où va

leur seuil inexploré?

L’avenir, nul ne le voit.

Il suffirait peut-être d’un pas

de côté

pour plonger dans l’éternité

mais ce qui nous retient de retourner

dans son royaume muet

c’est

notre amour sans preuves, l’objet

toujours perdu, toujours gagné.

L’avenir, nul ne le voit.

C’est ton cœur qui se déploie.

LE VENT

Le vent ne sait pas

qu’il porte les graines

d’une autre mémoire.

Le ciel ne sait pas

qu’il transporte les rêves

d’un autre oubli.

La chair ne sait pas

qu’elle emporte tout le passé

dans un seul avenir.

ENIGME ET SHEKINAH

à Reginald Gaillard

Le Poème nous éclaire

de la lueur du premier matin

et du dernier sourire.

L’enfant le sait.

Il a baigné

dans la lumière vivante.

Qui dérobe la splendeur

qui nous jette dans l’Obscur?

Quelle haine,quelle envie

ont-elles reconstruit

Ur dans les cœurs

et la peine et la peur?

La Présence nous éclaire

de la lueur du premier matin

et du dernier sourire.

L’adulte le sait.

Il a trahi

le rêve éblouissant.

Et pourtant

à nouveau,elle disparaîtra

la ville de la fausse parole.

A l’horizon,Abraham

verra poindre le jour

de l’éternel éveil.

Sortir de la fausse mort

Extraits

I

L’enfant qui appelle au fond de chacun

reste tapi dans l’obscurité de l’abandon.

il faudrait le prendre dans les bras

et lui murmurer la berceuse du retour.

Mais non, d’emblée nous avons choisi

de ne pas entendre la profondeur de son cri.

L’adulte qui ment au cœur de sa vie

reste sali sous la fausse lumière du pardon.

Il faudrait le tirer de sa nuit

et lui crier la colère du premier jour.

Mais non, longtemps nous avons choisi

de ne pas rejeter la noirceur de son silence.

II

Ne reste pas immobile, ne dors pas

auprès du fantôme, ne reste pas silencieux

parle, dans le peu de parole, face

au vide, parle, adresse-toi à l’interlocuteur

absent mais formule encore ton refus

de la parole figée des masques.

Cela avance, cela parle, cela

porte la vie et la mort en même temps

c’est pourquoi le masque est inutile

mais oseras-tu l’arracher au risque

d’emporter les traits du visage, de nier

l’interlocuteur présent, la parole vivante du refus?

III

Ne cherche pas à combler le manque:

il te constitue. Ne cherche pas à ignorer

le manque: tu le constitues.

Etre au monde - voilà ce qui compte

et voilà ce qui disparaîtra.

Le monde existe quand tu le perds.

Ne cherche pas à scruter le vide:

il a tes yeux. Ne cherche pas à voiler

le vide: tu le restitues.

Aimer le monde - voilà ce qui survivra.

Le monde répond quand tu l’oublies.

IV

Dur désir de l’autre:

nul ne s’échappe, nul ne revient.

Et pourtant nul ne le connaît

entièrement. Chair ou mémoire:

laquelle nous attire et nous piège

dans l’illusion douceâtre du savoir?

De l’oubli de l’autre:

nul ne s’échappe, nul ne revient.

Et pourtant nul ne le désire

entièrement. Deuil ou salut

lequel nous retient ou nous soulève

dans l’intuition vivante de l’Inconnu?

V

Ce que c’est : nous ne le devinons pas.

Nous pouvons errer, hésiter

entre innocence et cruauté, blesser

ou être blessé, nous ne voyons le secret

qu’au moment fatal et droit

où soudain il nous a échappé

Ce que c’est nous l’avons su.

Nous pouvions tenir, choisir

entre rêve et action, avancer

ou régresser, mais nous avons vu

le secret. Au moment fatal

sa loi nous a foudroyés.

VI

Une vérité de parole: est-ce

possible? Et s’il n’y en avait pas

d’autre? Enfermés dans la chair

que voyons-nous? Notre regard est mêlé

au monde mais que voit-il

à travers nous, le monde inconnu?

Une vérité de désir: est-ce

possible? Et Si elle n’était pas

créée encore? Libérés par la parole

que dirons-nous? Notre voix est mêlée

au silence du monde mais que sait-il

à travers nous, le silence de la vérité?

VII

Un homme, une femme, un enfant:

c’est la même histoire.

Nus et couverts d’un drap

debout et jetés dans le vide

en même temps : le visage tourné

vers le seul amour qui ne revient pas.

Un enfant qui naît d’un regard:

c’est la seule histoire.

Perdu et trouvé dans un cri

nourri et assoiffé dans le désert

en même temps : l’amour germé

dans la seule trace qui ne meurt pas