Beñat Achiary

Chanteur de la musique d’aujourd’hui même si elle mille ans, Beñat Achiary est le témoin vocal des aventures de l’homme contemporain. Beniat Achiary est un basque semeur de temps et d’étoiles, un vent qui souffle avec trop de force tant le toit de sa voix s’envole haut vers tous les chants inspirés. Beñat Achiary est un envol.

Avide de rencontres musicales et humaines, il aura su faire entendre dans sa voix le vent et le bruit des chevaux dévalant le pays basque.

Le natif de Saint Palais aura fait de chaque aventure musicale d’autres palais. Sa voix, capable des murmures dignes de ceux des fontaines de Grenade ou des cris cascades de ses Pyrénées, est malléable comme la rosée.

Grand habitué des joutes verbales de la culture basque, il sait devenir un authentique chanteur de flamenco, un chanteur indien ou un compagnon des folies de Bernard Lubat. Beñat Achiary, ce basque à la voix géniale, est surtout l’homme des rencontres. Depuis le chant de ses origines, jusqu’aux aventures des rives du jazz avec Michel Doneta et d’autres (Bernard Lubat, Dominique Regef, Daunik Lazro...), toujours poussé par les vents des découvertes sonores, Beñat Achiary trace sa voix et son chemin dans le chant des hommes.

Sa voix peut enjôler, miauler à la lune, caresser les statues ou hurler à la joie. Il peut devenir berger des sons et rappeler tout le troupeau de la musique par ses modulations qui porte au-delà des brumes et des montagnes.

Chanteur, improvisateur, poète aussi il parle aussi bien du merle noir de son enfance que de Federico Garcia Lorca.
Homme protéiforme il fait des performances musicales, des soirées de pleine lune, mêlant ses techniques de traditions populaires à la technique vocale classique. Il apparaît aussi bien dans les chants de la guerre d’Espagne qu’au détour de Tolstoï. Homme de jazz et de blues mais de tous les pays du monde, il a croisé le fonds séculaire de la tradition orale avec les routes ouvertes de l’improvisation et de la création la plus libre.
Il reste au plus près du cœur sauvage comme le dit son spectacle avec Pedro Soler.

"Près du cœur sauvage" est une aventure différente comme un dialogue intime, de cette simplicité des sources venues de loin, filtrées dans les strates de nos vies intenses.
Ces sources parfois murmurent des sons troublants sous des halliers secrets...
Mais parfois cette musique prend les violences et les caresses de grands vents...
Elle a cette intimité exacte et audacieuse des mots d’amour brûlants
Elle palpite de cette proximité inassouvie des lèvres et de l’âme. Temps précieux suspendu...

Courses en quête d’absolu comme le cerf bramant sur la colline dont parle Lorca en pensant à Saint-Jean de la Croix. De confidences arrachées, elle se fait posséder par la transe des danses sauvages e de haute science. Les grands poètes peuplent ces territoires... Chevasin Luca, Gongora, Lorca, René Char et les basques Zamora, Artze, Casenave...

"Près du cœur sauvage" ce sont les traces de ces aventures indomptables. Beñat est avant tout un homme sans frontières, lui l’enraciné dans sa terre basque. Sa voix inouïe lui permet de sauter au-dessus de toutes les bornes et les postes de douane dressés par les hommes par frilosité au monde. Il dégage la beauté physique de l’évidence. Il pourrait user de son charisme dévorant, mais lui modeste et humble ne célèbre que l’essentiel et le durable dans les chants des hommes. Venu du tréfonds du chant traditionnel, il est devenu le carrefour des cultures du monde, capable de se fondre dans toutes les musiques en les magnifiant toutes. Il n’a pas trahi son Pays Basque français où il est né et toujours installé, il l’a ouvert aux souffles d’ailleurs. Lui l’improvisateur vertigineux, il a façonné une utopie de fraternité par le chant. Chant aussi libre qu’un vol d’oiseaux qui passent. Il se souvient autant des Indiens navajo que des sursauts tumultueux du free-jazz libertaire. Du soleil noir du flamenco que des chants basques les plus simples. Ses vocalises sont des ailes.
Il est l’oralité faite homme. Il est en est le poète et le barde. Son chant est une odyssée. Il est cri et espérance, résistance et ouverture. Douceur et mascaret de colère.
Tout cela avec l’argile élémentaire de sa voix.

Beñat Achiary est toujours près du cœur sauvage.

Gil Pressnitzer