Christine Valcke

Une image du temps

On voit la brume, dit-il,
on voit des ombres. Il y a
comme du jour quelque part,
comme des gestes arrêtés.
Un bruit de quoi? Que voit-on ?

Suite de trois poèmes de Jacques Ancet et quatre lithographies rehaussées à la main, l’ensemble tiré sur Velin d’Arches et papier Japon aux ateliers de la Maison du Roy à Sigean par le lithographe Pierre Robinault.
Chemise peinte sur Velin d’Arches dans chemise cartonnée.
Format 29/24, 25 ex.numérotés, 10 E.A, 3 H.C
2013

Dans le refuge des heures : Christine Valcke

Christine Valcke est une artiste rare : chez elle l’ombre lève l’ancre par effet de noir.

Dans « Une image du temps » l’artiste déplace le texte de Jacques Ancet bien au-delà de ses bases.

Les lithographies éteignent les grandes veilleuses qui donneraient corps au paysage.

Restent les fenêtres qui boudent le réel.

Celui-ci est contraint à faire machine arrière au profit d’une vision d’envers.

L’image venue de lieux mouillés d’outre-suie pour guetter le passage du temps avec une sévérité de pierre.

D’une faufilure sombre Christine Valcke festonne des carrefours, borde des nues, brigande quelques verticales, effiloche des pans.

Trieuse des clartés l’artiste au besoin écorche des ciels déchus.

Elle les pend par des cheveux. Des trames voilent l’horizon, des lignes de labours célestes détrempent leurs plis dans des outres de brouillard quasi métaphysique.

Ce n’est ni charmant, ni insolent mais profond, subtil et sans bravade en un caban de ténèbres.

La noirceur vient en pécheresse exténuée s’agenouiller dans le blanc.

Des brides de chevaux invisibles se mettent en croix.

Mais on ne peut parler de tristesse. Des steppes sombres de l’hiver surgissent des épingles noires.

Elles font des grâces à la blancheur par quelques malices.

Le temps où les amoureux emmêlés pataugeaient dans leurs linges éparpillés se termine.

Mais l’éternité provisoire s’impose comme unique vérité. La monteuse de crépuscule y recompose son ode à la vie aux claires-voies de ses mains votives, philosophales, émotives.

Jean-Paul Gavard-Perret

« Une image du temps », Atelier de la maison du Roy, Sigean, texte de Jacques Ancet.

On voit la brume, dit-il,

on voit des ombres. Il y a

comme du jour quelque part,

comme des gestes arrêtés.

Un bruit de quoi ? Que voit-on ?


Du bleu ? Un plafond peut-être ?

une porte entrebâillée

sur rien ? Ni droite ni gauche ?

Une sorte de silence

dans les yeux, entre les doigts

sans mains ? Que sent-on si près

si loin ? Un peu de lumière ?

Des bruits qu’on n’entend pas ?

Contre la bouche, le monde ?

Chaque jour on perd le jour.

Chaque jour ce qui finit

ressemble à ce qui commence.

On voit la blancheur. On cherche

derrière une image du temps.