André Laude

Une colère si proche du soleil

Toute mon expérience poétique s’articule autour de cette perspective : la poésie doit changer la vie.

(André Laude)

si j’écris c’est pour que ma voix vous parvienne

voix de chaux et sang voix d’ailes et de fureurs

goutte de soleil ou d’ombre dans laquelle palpitent nos sentiments

si j’écris c’est pour que ma voix vous arrache

au grabat des solitaires, aux cauchemars des murs

aux durs travaux des mains nageant dans la lumière jaune du désespoir

si j’écris c’est pour que ma voix où roulent souvent des torrents de blessures

s’enracine dans vos paumes vivantes, couvre les poitrines d’une fraîcheur de jardin

balaie dans les villes les fantômes sans progéniture

si j’écris c’est pour que ma voix d’un bond d’amour

atteigne les visages détruits par la longue peine le sel de la fatigue

c’est pour mieux frapper l’ennemi qui a plusieurs noms.

(André Laude, Comme une blessure rapprochée du soleil, La pensée sauvage, 1979)

Ainsi parlait André Laude, homme blessé, calciné, qui aura vainement tenté de changer le monde pour sauver les rêves. Mais ce monde est plus désenchanté que réenchanté et André Laude se sera brisé sur le granit des cynismes. De Cuba à Israël, de son don vers l’ouvert à ses blessures intimes, il a tout tenté, il a tout perdu, et il s’est naufragé intérieurement. Et lui le poète est mort, suprême dérision, lors du marché de la poésie.

Toujours enclos dans ses nostalgies lendemains qui chantent, il n’aura pu attendre ni l’aube, ni l’homme.

Malgré ses lassitudes, ses abandons il écrivait pour que sa voix nous parvienne par-dessus les illusions. De ses rêves de paix israélo-palestinien, de Shalom à Salam il aura pu voir le rouleau compresseur du réel bafouait ses utopies. Et le cauchemar des murs est bien dressé encore maintenant, dru et plus haut que le ciel. Ses bonds d’amour n’auront pas troublé la froide et lisse surface des consciences.

D’André Laude il ne reste que des traces et quelques amis qui maintiennent la lampe allumée. André Laude, ses laudes à lui furent des cris d’écorché contre les injustices, des javelots contre la bêtise. Certes l’ennemi est toujours debout, mais Laude est toujours vivant.

La colère et l’espérance

De tous les combats, de tous les peuples, il ne voulait parler que la langue de l’espérance. Hors de son époque, hors de son temps, il croyait en la responsabilité des mots et des poèmes. Contre la « réalité d’opérette », il tambourinait à poings nus contre la fatalité du désespoir. Il comblait ses famines par le pain partagé entre tous.

Homme en guerre, il ne pouvait ni vivre à genoux, ni écrire autre chose que le simple et l’essentiel. « Liberté couleur d’homme » dit l’un de ses livres, il s’agit bien de cela. Et pour lui la poésie était une arme et non un jeu de hasard :

plus jamais je n’aimerai la poésie poétique

tant qu’il y aura une lumière incarcérée

tant qu’il y aura un nouveau-né affamé

déjà rattrapé par les canines du néant… (Vers le matin des cerises)

Il croyait que la poésie change et le monde et la vie. Magnifique illusion !

Il était fou de femmes et d’alcool, de cinéma, d’art photographique et de la vie qui passe.

À lui l’Homme pris dans la violence du temps, il faut offrir la tendresse de la mémoire. À lui le fouilleur de feu, le voleur de feu il faut faire clairière de mots. Quand il criait toute sa haine, c’était par chant d’amour. Rebelle, il le sera toujours et le fusil des mots touche en plein front des quiétudes viles.

Il aura pu voulu parler de lui et donc par respect il ne sera mentionné que quelques indices. Il faut juste en dire quelque chose pour que le temps ne soit pas gagnant et l’absence triomphante. Le mieux est de lire sa propre autobiographie :

« Né le 3 mars 1936. Famille ouvrière. Exilé à Paris, renouera plus tard avec la terre-mère : l’Occitanie. École sous l’occupation nazie. Premières masturbations et premières révoltes. Très tôt écrit et rêve de devenir journaliste. Fait la connaissance d’une bande de poètes et peintres anticonformistes. Militant anarchiste. Autodidacte, lance à 17 ans le cri fameux : "A nous deux Paris". Réponse de l’écho : "Pauvre con". Apprend difficilement à bien faire l’amour. Rencontre André Breton, Benjamin Péret et quelques autres "phares". Guerre d’Algérie : horreur et souffrance. Des tas de petits métiers. Quitte l’Europe pendant plusieurs années. Voyages : Cuba, Orient, Asie... Revient en Europe. Écrit dans cent journaux et magazines. Publie des recueils de poèmes. Pauvreté, humiliation. Laisse pousser sa barbe pour cacher les cicatrices. Un seul désir : vivre et jouir sans entraves en cherchant à faire la peau du vieil homme ». (Joyeuse apocalypse).

Il a écrit une autobiographie très fantasmée dans « « Liberté couleur d’homme », et depuis certaines de ses propres légendes sont encore reprises, il ne sert à rien de les démentir, il le voulait ainsi.

L’association « Les amis d’André Laude », sous l’impulsion d’André Cuzon, a pu démêler l’écheveau intentionnellement tressé et nous nous en sommes servis dans ce petit hommage.

Ce natif des pays de l’imaginaire qui se voulait surtout « venu de nulle part et désirant être son propre géniteur », sera anarchiste jusqu’au tréfonds, et il deviendra le scrutateur lucide de son siècle.

Journaliste au Monde, aux Nouvelles littéraires, et dans bien d’autres journaux, il passera sa vie en révolte et mourra le 24 juin 1995 durant le 13ème marché de la poésie à Paris, pauvre et malade.

Sa « douleur polonaise » sera toujours saignante, sa mère Olga Katz, Olga Louazon en réalité, était selon lui juive polonaise et partie en « cendre et fumée à Auschwitz ». Cela ne fut pas, et elle mourra en France quand il avait un peu plus de deux ans en 1938. André Laude avait voulu cette identification à la Shoah par une sorte de fusion compassionnelle et fraternelle à la tragédie du monde.

Une poésie qui s’ouvre les veines

Il se réclamera aussi du soleil occitan de son père, Ferdinand Laude, mineur près d’Alès, puis plombier par la suite. L’amour de la Bretagne sera une profonde marée en lui qui jamais ne l’abandonnera.

De cette vie en rupture, modeste et souvent pauvre, il fera une arme de révolte. Puis viendront les doutes et les désenchantements, la lente glissade vers la simple survie alimentaire. Mais sa poésie claquera toujours dans son soulèvement gorgé de vie brûlante. Elle sera son incandescence, sa présence au monde :

Parce que nous en avons assez d’être parqués dans les

pâtures empoisonnées du malheur

parce que nous en avons assez de loger dans l’aile en

ruine de l’histoire

parce que dans nos poignets brûlent des avoines et des

seigles de tendresse

parce que des faims neuves provoquent des émeutes au

fond des faubourgs du sang

et que les écluses de la patience fléchissent à travers la

géographie mouvementée de notre rêve

Nous allons seller les chevaux fabuleux de la révolte et

du courage… (Nous sommes présents au monde, 1962 !)

Lui se voyait comme un « traîne savate sans domicile fixe et sans profession, et toujours au bord du fleuve ».

Il se croyait « homme de ruines », mais il était celui qui montrait le grand large de la liberté. Il fut l’ami d’André Breton mais surtout de tous les pauvres, et aussi « un vent de soleil qui se lève ».

Nous en sommes encore réchauffés et gardons une place en nous à celui qui « dansait avec les lucioles ».

Cet homme était le livre du monde de la poésie, dont il pouvait dire par cœur des myriades de vers, avait fait glisser l’une sur l’autre et sa vie et la poésie toute entière. Fleuve Amazone de tous les affluents qu’un jour ont pu faire couler hors d’eux les « hommes-paroles », il draine les limons de tout ce qui un jour a su vibrer et changer l’eau en sang vivant.

Il laisse sur les eaux les ricochets de sa Bretagne et de son Occitanie, de son enfance et de ses guerres. Les galets des hommes sont plus lisses après lui. Et ils apprennent enfin à maudire les mensonges et cette fausse vie que l’on leur fait.

André Laude était certes désespéré, mais il a su sortir du bain rituel du néant. Il croyait très fort au temps du retour des hirondelles, il croyait en l’homme, aux lumières de la fraternité.

Il demeure, pour ceux qui le liront encore plus tard que ces jours sombres qui avancent vers nous :

Un homme immense

de la rose qui s’acharne

à fleurir parmi nous les morts

mal enterrés

aux quatre coins du pays (1991)

Par lui nous pouvons dire :

« …Nous sommes à jamais présents au monde

logiquement situés entre la mer et le soleil les nuages

et les moissons. »

Gil Pressnitzer

Choix de textes

Je m’appelle personne

Je n’ai pas de nom. Je m’appelle Personne.

Les riches ont l’or,

mes maigres mains creusent le rio.

Mes maigres mains creusent un sillon de mort.

J’ai enterré tant d’enfants que ma mémoire

est une encre sauvage.

Je n’ai plus de mains. Je n’ai plus d’âge.

J’ai la sagesse des grands arbres brisés par les Américains.

Je suis un Peau-Rouge. Jamais je ne marcherai

dans une file indienne.

J’ai très mal au cœur, au sexe, aux entrailles.

Je prie. Je suis Sioux.

Je prie. Je crois à la revanche.

Je suis celui qu’on ne peut pas tuer au cœur de la bataille.

J’étais je suis je serai

J’étais pierre éclatée, soleil-sida,

j’étais cadavre sous les brassées de fleurs.

J’étais silence mural. J’étais cimetière de campagne.

J’étais oiseau aux ailes brisées, mazoutées.

J’étais vieux, alcool

parlant sans cesse de guerre dans les djebels.

Je suis un scénario de suicide. Je contemple le fleuve.

Je vois passer des cadavres de veuves.

Je me hais et je veux mourir. Je me hais

et je veux mourir.

Fermez les yeux. Songez une dernière fois

à mon profil de poète grec,

dans la plus pouilleuse île.

Je serai, à partir de ce jour, ciel, ciel et ciel.

Ciel au-delà de vos folies meurtrières.

Je serai ciel. Je serai éternel.

Encre et sang

Je fais de ma vie de

nuit en nuit un tas d’ordures.

Je fais de ma vie une brumeuse chronique.

Je fais de ma nuit le carrefour des fantômes.

Je fais de mon sang un long fleuve

qui tape à mes tempes.

Je fais de ma peur un oiseau noir et blanc

Je fais d’un oiseau mort, pourri,

l’enfant que j’aurais pu être.

Je fais d’un enfant un feu fou, un bloc de cendres.

Je fais de ma mort à venir un festin de serpents.

Je fais d’un serpent la corde pour me pendre.

Je fais d’un long, acharné silence le testament

de tout ce qui fut désastres, horreurs, ennuis,

ruptures et interminables hurlements.

Je pisse de l’encre et du sang.

Je chante sur le bûcher des châtiments.

Le ver dans le fruit

Je longe le long sillon qui conduit aux morts muets.

Je songe à la neige, aux chevaux de feu,

à l’hiver des paroles.

Je vois des bois brûlés, des vaisseaux échoués,

des mouettes prises par le gel.

Je longe le fleuve de sang et de larmes

qui traverse les inquiétantes ruines.

Je sens l’odeur des prédateurs, l’urine

de la hyène, la matière fécale des jeunes bébés.

J’écris à partir d’un noyau de nuit.

J’écris à partir d’une tranchée noyée de boue.

J’écris corde au cou.

La trappe déjà tremble sous mes pieds.

Je longe le marbre froid qui donne le frisson

et chante une très étrange et vieille chanson,

qui dit qu’aujourd’hui et pour toujours

le ver est dans le fruit.

Corrida

J’adhère à ma mort comme l’astre au ciel.

La vie cruelle

a tué en moi beaucoup d’or

et d’enfants qui ont pleuré au bord des lèvres.

Le temps est venu

de remettre les pendules à l’heure.

Adieu heure d’été, Adieu heure d’hiver

c’est maintenant l’heure de l’exil blanc et des remords.

Déjà je m’enfonce en terre

chandelle éteinte.

En bon et fougueux matador

j’esquisse une feinte.

À quoi sert de défier cape rouge et cape noire.

La poésie est simple comme bonsoir

au milieu d’une arène de sable et de sang. Décapité

Nous n’habitons nulle part nous ne brisons de nos mains

rouges de ressentiment que des squelettes de vent

nous tournoyons dans un désert d’images diffusées par les

invisibles ingénieurs du monde de la séparation permanente

retranchés dans les organismes planétaires planificateurs

infatigables du spectacle

nous ne sommes rien nous ne sommes qu’absence

une brûlure qui ne cesse pas nous n’embrassons nulle bouche

vraie nous parlons une langue de cendres nous touchons

une réalité d’opérette

nous n’avons jamais rendez-vous avec nous-mêmes

nous nous tâtons encore et toujours

nous errons dans un magma de signes froids nous traversons

notre propre peau de fantôme

le soleil du mensonge ne se couche jamais sur l’empire de

notre néant vécu atrocement au carrefour des nerfs

nous n’avons ni visage ni nom nous n’avons ni le temps

ni l’espace des yeux pour pleurer trente-deux dents

totalement neuves pour mordre

mais mordre où mais mordre quoi

de fond en comble toutes les chaînes

autour desquelles s’articulent nos chairs nos pensées

d’aujourd’hui

jusqu’à ce qu’elles cassent dans un hourrah de lumières de

naissances multiples

décrétons le refus global

les jardins des délices tremblent et éclairent au-delà

la révolte met le feu aux poudres

taillez enfants aux yeux d’air et d’eau les belles allumettes

dans la forêt des légitimes soifs

taillez les belles allumettes pour que flambe le théâtre d’ombres universel.

Testament de Ravachol, éd. Plasma 1974

Avec ma gueule de métèque

je marche le long des grands boulevards

de l’Europe de l’Ouest sclérosée

à la peau du ventre fripée

Je suis juif de Lodz

j’ai quitté

il y a

à peu près un siècle

le Shettl natal

pour devenir

raccommodeur de vieux vêtements

rue des Ecouffes

fidèle client

de la synagogue

et du bistrot

de Goldenberg

Je m’appelle

Moshé Isaac Lewinshon

Je suis kabyle

du Ravin de la femme sauvage

je balaie les feuilles mortes d’octobre

en récitant du Prévert

L’été je vide les poubelles

c’est beau

Paris à cinq heures du matin

dans l’Ile-Saint-Louis

Là-bas m’attendent

femmes et enfants

je reviendrai un jour

au douar

riche et tuberculeux

Je m’appelle Mohamed Larbi

Fils de la Kahena

Enfant du grand désordre

Je suis nègre

du pays des grands fétiches

et des lacs profonds, brûlants

aux poissons lourds

chez Renault Billancourt

je travaille à la chaîne

À la pause de midi

je tape sur les vieux bidons

cabossés

et ça fait rire les copains français

qui entre eux à voix basse

prétendent

que j’ai bouffé mes grands-parents

Je suis nègre

syndiqué

il y a des femmes blanches

que je désire

en silence

Je m’appelle Abou Diouf

et il paraît

que j’ai vingt-trois ans

je ne bois jamais

car je suis bon musulman

et les autres se mettent en colère

parce que je refuse de me saoûler

en leur compagnie

quand tombe la nuit

sur Pantin Saint-Ouen

Bagneux Ivry

rue Saint-Denis

Avec ma gueule de métèque

je marche le long des grands boulevards

de la civilisation occidentale

j’ai toujours peur

des flics qui cognent

tâtent sournoisement

sous mon imperméable

j’ai toujours peur

des regards haineux

des sourires des mères

qui promènent

leur progéniture

j’ai toujours peur

des néons

de la foule

des bagnoles qui me frôlent

des feux rouges

des fins de journées

des patrons de cafés

et de leurs chiens-loups

J’ai toujours peur

dans le métro

au BHV

dans la rue

dans ma chambre

propre et triste

nue

J’a toujours peur

de mon visage

dans le regard de l’autre

J’ai toujours peur parce qu’obscurément je sais

que je suis coupable

coupable de tout

Pensez :

Je viens d’ailleurs

Ma voix est rauque

je suis différent

Mon sang

a coulé

d’un feuillage inconnu

ici

J’ai toujours peur

Et pourtant

j’aimerais avec chacun

parler

de la pluie

et du beau temps

leur montrer à tous

les vieilles photos jaunies

de là-bas

du pays

Mais je ne peux pas

faire le premier geste

car j’ai toujours peur

Mais je vous demande

Pardon

Le Fou parle n°12 - mars 1980

Dernier poème

Ne comptez pas sur moi

je ne reviendrai jamais

je siège déjà là-haut

parmi les Elus

Près des astres froids

Ce que je quitte n’a pas de nom

Ce qui m’attend n’en a pas non plus

Du sombre au sombre j’ai fait

un chemin de pèlerin

Je m’éloigne totalement sans voix

Le vécu mille et une fois m’abuse, vaincu.

Moi le fils des Rois.

Poésie urgente

Plus que jamais la poésie est urgente. Vitale comme le pain et le vin. Nécessaire comme la pluie et le soleil, les néons et les nuits polaires.

À l’heure où s’effondre définitivement le rêve révolutionnaire nourri d’octobre 17, à l’heure où l’abjecte massification, l’uniformisation dans le pire médiocre s’accélèrent, à l’heure où en dépit de certaines apparences, la « liberté » de l’individu - fondement incontournable de toute civilisation - rétrécit, à l’heure où les politiques s’épuisent, où les tyranneaux prolifèrent, où les nationalismes, les intégrismes se réveillent, où la pauvreté enflamme les têtes autant que les slogans stupides et simplistes, la poésie est, d’abord et avant tout, une « arme miraculeuse » (Aimé Césaire) pour la Résistance. Totale Irrécupérable Sur tous les fronts.

Résistance contre ce qui endeuille l’être, souille, mutile, brise, l’élan de l’individu vers le « Champ des possibles », l’immense continent de la Vie encore inconnu, qui attend son Christophe Colomb. La poésie ne relève pas des dogmes établis. Elle est cet outil pour l’homme qui lui permet de prendre la mesure de sa non-finitude, de sa majesté et de son mystère émouvant et inépuisable.

Elle est le vent qui le pousse dans le dos dans sa marche à l’étoile, l’éclair qui l’arrache à l’humus pour le projeter à hauteur d’astres de plomb et de feu.

Langages, étranges copulations de mots, bouleversements de syntaxes, volontés de dialogue, énoncés du monde sensible, fouillements des ténèbres, cris d’amour, d’humour surtout « noir », enracinements dans l’errance, la glèbe ou la « big city », explosions de désespoir qui s’ouvre curieusement sur quelque innommable espérance, la poésie est aussi, dans sa plus haute condensation, germination, acte.

Acte qui implique que tout poète authentique, fut-il élégiaque et soumis aux subtils secrets métaphysiques, est un réfractaire un vrai outlaw Hölderlin, Rimbaud, Maïakovski même combat !

Poètes Solitaires. Poètes Solidaires. Jusqu’au revolver, la jambe pourrie, la raison « saccagée ».

La poésie est ce dont l’homme - même s’il l’ignore ou feint de l’ignorer - a le plus besoin pour tracer au flanc du monde la cicatrice de sa dignité. La poésie : un vertige permanent entre la lune et le gibet.

Sans Poésie - libre, follement libre - l’univers serait boule morte. La poésie aux lèvres

rouges : la potion magique pour guérir, peut-être, l’angoisse électrique de l’inconnu qui écrivit une certaine heure de fièvre sur les murs de Mai 1968 : « Y a-t-il une vie avant la mort ? »

André LAUDE

(Document fourni par l’Association les Amis d’André Laude)

Bibliographie

Œuvres complètes aux Éditions de la Différence. 2008

Liberté couleur d’homme (essai d’autobiographie fantasmée sur la terre et au ciel avec figures et masques) Encre, 1980, Collection Brèches

Joyeuse apocalypse, Stock 1974

Testament de Ravachol, Éditions Plasma 1975

Comme une blessure rapprochée du soleil, Éditeur Pensée sauvage, 1979

19 Dix-neuf lettres brèves à Nora Nord, Le Verbe et l’empreinte, 1979

Vers le matin des cerises, Éditions Saint-Germain-des-Prés, 1976

Journaux de voyage, Albatroz 1990

Un temps à s’ouvrir les veines, Petite Sirène