Jango Edwards

Passé les limites…

Eh oui passé les limites, il n’y a plus de bornes, et Jango Edwards américain vivant à Amsterdam les a toutes franchies il y a bien longtemps.

Clown lubrique et complètement fou il a porté le mauvais goût à un si haut niveau que cela devient de l’art plus que du cochon. Monstre ou comique ou plutôt monstre comique sa démesure balaie tout et les spectateurs innocents qui se mettent au premier rang l’ont vite compris, submergés par de la peinture, de l’eau et surtout des rires. Ceux qui sortent du spectacle aussi car Jango leur saute dessus avec ses serpentins de folie furieuse surgissant comme un diable.

Il a tout d’un merveilleux provocateur, exhibant des masques, mettant en scène une sexualité et une homosexualité débordante. C’est non pas un tollé qu’il déclenche mais une avalanche de fou-rires.

Jango Edwards est follement drôle et un grand acteur. Qu’il se déguise en Tarzan libidineux ou en vielle dame usée, ses dons de transformiste sont renversants.

Chanteur, mime acrobate, exhibitionniste éhonté, danseur, magicien, compositeur, chorégraphe, auteur, danseur,.., et bien d’autres choses encore, Jango est un monstre de scène. Le fou du fou-rire.

Au secours, le plus fou des Américains revient hanter les planches des théâtres et saute sur les spectateurs avec son rire déjanté et ses serpentins.

Seul américano-hollandais a être compris instantanément par tous, car il a inventé un langage de sons et de gestes qui font que tous les mal-comprenants de la terre entendent leur langue natale. Mime des délires, outrancier dans chacune de ses respirations et de ses regards égrillards, il fait d’une scène le plus grand des carnavals. Celui où pour un temps trop court toutes les apparences sont inversées, toutes les insolences recommandées.

Sauf que lui ne s’arrête pas à Mardi-gras et ne fait carême d’aucun rire.

Quel chemin depuis les gazons de Détroit (Michigan) à toutes les planches des scènes du monde.
Un passage à Londres en 1971 où il apprend l’ascèse du clown, du théâtre de la fête et de la libération, puis il s’installe après bien des tournées dans sa base d’Amsterdam.
Là, se déroule "Le Festival International des Fous", et c’est bien par l’art du fou et du clown, que Jango réinvente la délivrance par le rire, la communication avec l’autre en brisant les tabous de méfiance.

Véritable fou de tous les rois, Jango ose dire et sait dire tous les travers du monde. Sa grosse tendresse de gosse un peu sale nous force à nous ouvrir, à nous déboutonner l’âme.

Vous n’avez pas à savoir que Jango est aussi un gars bizarre Directeur occasionnel de l’Orchestre Symphonique National des Pays Bas, producteur de TV, mécène. l’écrirons donc pas.
Mais cette folie en liberté comme un fauve lâché, elle ne peut déferler que grâce à une immense performance d’acteur. Jango est toutes les écoles de clowns à la fois.
Si Howard Buten représente la thérapeutique douce et aimante de cet art divinatoire et de révélations qu’est le clown, Jango, lui, est le destructeur des bêtises, le pourfendeur des fausses pudeurs, le versant farfelu et obscène, mais autant salvateur de l’art du clown.

Il traque nos petites morales et les ridiculise par son art proche de Rabelais, et combien hautement pédagogique.

Toutes les paroles gelées se remettent à couler et il y a en de vertes et de pas mûres.

Jango a envahi la France vers 1987, il nous fut donné avec Jackie Ohayon de la Grange aux Belles de le faire découvrir bien avant.
Depuis Canal Plus, le Théâtre du Splendid ont rendu familiers ses dérèglements burlesques.
Jango est totalement ravageur, mais sans une once de méchanceté. Il se moque du bon goût, se vautre dans le prétendu vulgaire, et au détour d’un geste, il sait être poète e magicien.

Génial improvisateur ; il est aux aguets de son public et l’inonde de son amour pataud.
Depuis les Antoine de Caunes et autres ont tenté d’acclimater ce rire des jeux de cirque en France.

Mais Jango ne joue pas, ne fait pas un sketch, il est dans sa folie dévastatrice inimitable, ses improvisations incontrôlables sont nourries du véritable métier de clown. Le roi de tous les Carnavals, c’est lui, le fou de tous les rois.

Voici l’original, voici Jango, le fou à délier vos blocages.

Entrez, Messieurs, Dames, le clown sera roi ce soir. Nous le brûlerons demain.

Gil Pressnitzer