Richard Galliano

Le jazz comme un sentiment

Richard Galliano, l’homme à l’accordéon flamboyant, est l’inventeur du concept new musette et il a réconcilié l’univers des valses musettes avec celui du jazz le plus actuel.

Toujours libre, il a exploré les voies où l’entraîne sa sensibilité. Communiant un jour avec Michel Portal, un autre avec Claude Nougaro (La vie violence !), il refuse tout cloisonnement, tout ghetto et il a lancé son accordéon hors de tous les sentiers battus pour improviser aussi bien sur des thèmes de la Strada que sur de la musique free.

S’inspirant des maîtres, Astor Piazzola bien sûr, mais autant Bill Evans, Coltrane ou Eddy Louis, il a hissé cet instrument, voué au populaire, à l’universel, sans lui retirer son accent des faubourgs.

Son histoire, c’est son accordéon qui est sa seconde peau. Il l’explore, le tâte, le caresse, l’enfle et le fait expirer jouant sur les nuances, explosant toute la dynamique. Richard Galliano a apporté au jazz une intense expressivité harmonique, un poids de son, une densité émotionnelle lourde et têtue.

Loin des chapelles, il est de tous les croisements et il sait provoquer le fruit intense des rencontres, depuis les harmonies de Maurice Vander à l’astre lumineux Astor Piazzola, en passant par tous ses amis d’un élan : Joey Baron, Daniel Humair, Enrico Raya, Michel Portal, Toots, Didier Lockwood, Hermeto Pascoal, et bien sûr Biréli Lagrene qui sera son merveilleux complice ce soir au sein de son groupe Viaggio.

Accordéoniste de jazz, cela peut sembler un exploit de cirque, mais avec Richard Galliano cela devient une évidence. Citant son ami Nougaro, Richard Galliano entend cultiver ses défauts, et il fait son miel en recréant la musique avec ses erreurs fécondes. Jamais il ne sera un jazzman-qui-joue-de-l’accordéon avec un phrasé somptueux, un rythme superbe. Il préfère être un musicien libre, prêt à bondir sur toutes les aventures musicales. Et il touche profondément par son authenticité, sa saveur, sa couleur. Capable de dialoguer aussi bien avec la musique classique arabe qu’avec les Rita Mitsouko ou avec Luciano Bério, il est tout simplement un musicien ouvert.

Son immense succès actuel est réconfortant, car il marque la reconnaissance de l’expressivité en musique.

« J’en suis revenu à improviser comme lorsque j’étais jeune, à l’instinct. Je cherche à rapprocher ce que je joue d’un chant intérieur ».

Cet univers musical où énergie et souffle se transmuent sans cesse, nouant et dénouant tradition et innovation, fait de Richard Galliano un monde musical attachant un des grands de la musique française. Richard Galliano joue le cœur sur la main, au-delà du jazz.

Gil Pressnitzer