Pierre Igon

par Henry Lhong

Au bout d’un long couloir, étroit comme une coursive, on accède par un petit escalier raide, à l’atelier du peintre Pierre IGON. Ce qui frappe d’abord, c’est le plafond très bas, sur lequel l’artiste a collé ça et là des découpages de papillons.
Puis on remarque des os, posés sur des socles comme des statuettes, un iguane naturalisé et, sur des rayons de livres, des ouvrages consacrés à la mer, aux bateaux, et à la vie des animaux : Maeterlinck et Von Fritch. Bien sûr, il y a aussi le grand chevalet, l’inévitable forêt de tubes et de brosses et des toiles, des toiles partout, tournées contre les murs.

On imagine déjà l’homme qui vit dans ce cadre. Silencieux et secret, économe du geste et de la voix, poursuivant lentement, au rythme de ce va-et-vient qui le conduit de sa toile à la fenêtre, un inépuisable dialogue avec les formes qu’il crée.
Un artiste réfugié dans un inonde feutré, préservé, où la plus grande place - la seule, devrais-je dire sans doute - est faite à la Peinture, à cette peinture en train ou à faire et qui pèse sur le peintre de tout son poids de futur.

Mais les papillons, les livres de Maeterlinck, les bateaux, dira l’amateur de portraits, en mal de psychologie profonde ?
La réponse est sur le visage du peintre où je vois ce demi - sourire éternellement tourné vers l’enfance (comme c’est souvent le cas chez les meilleurs artistes) ; un bref sourire qui défend un monde clos et permanent, où déjà ce qui attire le futur peintre, c’est cette énigme hiératique des minéraux et des fossiles et ce résidu ultime - minéral, lui aussi - de l’homme : l’os.

Pierre IGON est né à Toulouse en 1922. Et ce n’est qu’en 1948, à l’âge de 26 ans, qu’il tente sa première exposition personnelle. Mais, pour bien replacer les débuts du peintre dans leur contexte, il convient sans doute de rappeler qu’à ce moment là, cette ville renouait d’une façon éclatante avec sa grande vocation de capitale provinciale dans le domaine artistique, et dans celui de la Peinture plus précisément.
Dans le bouillonnement intense des idées d’alors, dans ce sentiment tout neuf de liberté que laissait l’après-guerre, une vingtaine d’artistes venaient au jour et, comme une poussée de fièvre, se manifestaient.
On vit là un groupe d’amis, on ne vit pas qu’il s’agissait aussi d’une communauté d’esprit, et que ce que nous avons nommé par la suite la Jeune École Toulousaine, fut un phénomène unique et lourd de sens.

On sut qu’il y avait des peintres à Toulouse, on ne sut pas que ces artistes ne travaillaient plus comme leurs prédécesseurs à une dimension régionaliste mais constituaient déjà, selon la belle formule du critique Michel Roquebert « un bel exemple d’universalisme régional », c’est-à-dire d’une universalité qui se voulait farouchement enracinée dans ses profondeurs telluriques, ce qui était le seul moyen de parler de vive voix à la Peinture vivante, sans se soumettre à ces ambassadeurs, idiots ou surfaits, que sont la mode et le snobisme, et l’air du temps parisien.

La preuve se fit peu à peu quand on vit que sortaient de ce bouillon de culture des peintres comme MARFAING (Galerie Claude Bernard), JOUSSELIN (Galerie Jacques Massol), des sculpteurs comme FACHARD et… Pierre IGON.

Déjà, dans ce groupe en effervescence, ce dernier s’affirmait comme un peintre plus mûr, plus assuré que ses amis, plus seul aussi, un peu en marge par sa manière et par ses thèmes.

Sa formation d’ailleurs avait été différente. Il ne ne venait pas des Beaux-Arts, comme certains de ses camarades, plus où moins révoltés contre l’École.
Son école à lui, ç’avait été l’apprentissage d’un métier manuel qui devait lui laisser pour toujours l’amour des matériaux bruts, du fer, du bois et de la pierre et aussi la vie, dans ce qu’elle pouvait avoir de plus dur et de plus brutal à cette époque.
Un séjour en Allemagne au S.T.O (dont il n ’aime pas parler) l’a marqué, on le sent, et peut - être faut-il attribuer à cette expérience, de lui et des autres, les premiers thèmes de ses toiles, empruntés à un misérabilisme très nettement expressionniste.
Car, à l’époque Pierre IGON est encore, pour peu de temps d’ailleurs, figuratif. Il se plaît à peindre des paysages assez inquiétants, peuplés de rochers ou d’animaux qui tendent déjà à s’évader du réel et à devenir ces formes pures qu’il peindra par la suite.
L’analogie ici est frappante. II peint aussi, avec une sorte délectation très attentive à elle-même, des lapins écorchés et des crânes de bœuf ou des natures mortes singulièrement dépouillées et dramatiques et le tout est traité déjà avec cette sûreté de palette qui restera la sienne où les tons qui reviennent le plus souvent sont les terres, avec quelques éclats de couleur pure, rares et rapidement entourés, comme étreints par des gris froids.

C’est un monde refermé sur lui-même et étrangement figé que peint l’artiste. On sent rôder dans ses toiles une obsession de la mort, de la souffrance mais exprimée à mi-voix avec pudeur et aussi une fascination pour ce qui dure, pour les minéraux, les ossements, ce monde net et lisse, bloqué dans un mutisme immanent qui échappe à l’érosion ou, tout au moins, en ralentit le cours ou la retarde.

C’est par le biais de l’art sacré que la vie entre dans sa peinture et sa manière très personnelle fait de lui un grand artiste religieux, parce que ses personnages, ses animaux, par leur statisme même, échappent à l’anecdote et se situent d’emblée en dehors du temps.
Il participe à la décoration de l’Église de l’abbé C. Rivière, « curé de la Bastide de Besplas et autres lieux dans le pays de Foix » à qui Montherlant a dédié « La Ville dont le Prince est un enfant » et qui est un amateur éclairé.
Ses fresques, les dessins du catéchisme qu’il illustre, ses images sacrées mettent en lumière son goût vif de l’artisanat, son penchant pour l’imagerie populaire, son don de retrouver l’enfance, et un choix délibéré pour les techniques frustes, celles où la main de l’homme se fait le mieux sentir.

C’est vers la même époque environ 1951 - que Pierre Igon sans doute poussé par la leçon de la fresque et par une réflexion sur les problèmes picturaux, passe à la non-figuration. Cette démarche coïncide avec celle d’autres grands peintres et l’on s’apercevra sans doute dans les années qui viennent à quel point cette querelle de l’Art Sacré qui battit son plein aux alentours des années 50, fut décisive pour aider une mutation de la Peinture en France et implanter la non-figuration.

Igon s’installe dans un monde pictural libéré du sujet avec la plus grande aisance, il semble que ses toiles y gagnent en rigueur et qu’il parvienne à dire maintenant mieux et plus ! complètement tout ce qu’il a à dire. Cette « libération » du sujet ne le conduit pas à l’anarchie mais an contraire à un approfondissement de ses qualités de peintre, à un resserrement de ses moyens. Il conserve et enrichit une gamme chromatique très personnelle, faisant jouer inlassablement les tons froids, les noirs, les gris bleutés, les terres aussi.
Sautant carrément la première étape habituelle de l’abstraction qui est le géométrisme, il prend pour support architectonique un graphisme de valeur forte, noir en général, qu’il pose d’emblée sur la toile et qui organise la surface.
Il peut être intéressant de remarquer que ce graphisme - constant dans ses toiles, même dans les plus récentes - se développe selon les directions horizontale-verticale, rarement l’oblique, et qu’il devient ainsi vecteur de champs de statisme et d’équilibre, selon un schème formel de quadrature ou, si l’on préfère, de sa « mise en croix » de l’espace pictural.
L’artiste fournit ensuite les plans différenciés par l’étalement de surfaces toujours sensibles et très nuancées prises ’dans sa gamme ordinaire, avec, ça et là, quelques taches de couleur ou de blanc (pris en tant que couleur) qui viennent s’enchâsser, sans passages, dans les espaces de la trame du graphisme, lequel sert alors de cerne volontairement brutal.

Pendant plusieurs années, ainsi, Igon va poursuivre cette recherche en améliorant de plus en plus sensiblement ses qualités de peintre par des accords de valeur, des équivalences de nuances de plus en plus fines et des jeux de matière de plus en plus étudiés.
Mais cette matière n’a pas encore atteint une autonomie émotive, elle reste longtemps surface couverte d’une certaine épaisseur et bien soumise aux lois de la composition environnante.
Elle reste moyen « local » et, par cette conception, le peintre se rattache encore à la tradition de la peinture classique, obéissant aux règles qui régissent la figuration. Classiques - ou traditionnels - également, sa construction et ce souci constant de fini, de contrôle. L’organisation interne présente presque toujours une construction centripète on concentratrice et si les surfaces fortes n’obéissent pas toujours aux sacro-saintes lois de la composition, les libertés que l’artiste prend avec ces règles restent quand même atténuées et tiennent compte, d’une certaine façon, de ces lois.

C’est ainsi que l’on assiste souvent chez lui à des types non pas de déséquilibres - mais d’équilibres compensés. Les surfaces fortes décalées se trouvant reproduites par un retournement quasi textuel, selon le type de symétrie que la science moderne appelle éniantiomorphe, le centre de gravité de la toile se trouve alors placé sur une surface faible, traitée comme dans la peinture classique en fond ou faire-valoir.
Mais cette répétition éniantiomorphique de formes, qui s’opère au début par une mise en plan de valeurs égales, tend petit à petit à se créer par des jeux de valeurs parallèles prises dans d’autres gammes selon une perception d’équivalences intuitives.
Et c’est ainsi que, peu à peu, les blancs crayeux se réduisent (au bénéfice d’ailleurs d’une continuité plus dense du graphisme sous-jacent) et que, réduits à leur seule valeur de taches en contraste, elles perdent leur pouvoir coloriste.
C’est alors, et sans doute par un bénéfique hasard rencontré dans des toiles moins abouties,- précisément parce que là les équivalences on bien moins joué dans leurs accords - qu’Igon rencontre la lumière.

Ici, sans doute, convient-il de remarquer qui l’étiquette d’expressionniste abstrait que la critique a collé trop souvent pendant cette période sous le nom de l’artiste ne tient pas.
S’il y a de l’expressionnisme chez Igon, on le rencontre à deux périodes bien précises. Au début, dans ses toiles figuratives où le misérabilisme ostensible, délibéré, et le côté « à vif » de ses thèmes pouvaient faire figure d’expression et après 56, précisément quand Igon utilise la lumière.
Mais de 1951 à 1956, il semble au contraire, que le peintre s’éloigne de l’expressionnisme pour approfondir un monde pictural dont les « gestalten » agissent d’une façon lente et secrète, concourant à créer cette impression de monde clos, fermé, silencieux, un peu étouffant, qui semble figé dans une hiératique immanence.

Période de recherche et de transition qui offre ceci de remarquable c’est qu’on y retrouve, dans des signes qui n’offrent plus que des allusions au figuré, (et encore celles-ci échappent-elles à l’artiste), ce monde de formes connues qui était le sien autrefois et n’est pas sans évoquer ce que l’on a appelé plus tard « le paysagisme abstrait ».
Mais il faut noter aussi que le paysagisme abstrait, tel qu’on le connaît, utilise trop souvent des moyens de l’impressionnisme, s’intéressant beaucoup plus à l’atmosphère courant sur les formes qu’aux formes elles mêmes, alors que Pierre Igon prend le contre-pied en construisant.

Ces toiles ne sont pas proches d’une « ambiance » de paysagiste mais ses formes tant par le chromatisme que par le tracé organisateur ont des analogies formelles avec les sous-bois, les rochers (en « chaos organisés » si je puis dire) et le minéral. Ainsi, retrouve-t-on un type précis de sensations, un domaine expressif aux alentours duquel, qu’il s’agisse de figuratif ou de non-figuratif, Pierre Igon toujours rôde.

Nous disions plus haut que c’est sans doute vers 1957 que l’expressionnisme reparaît dans l’œuvre d’Igon, avec l’intrusion de la lumière.
Mais c’est encore ici, au sein de l’abstraction des formes, un expressionnisme à caractère figurant. La dramatisation est obtenue par des découpages de plans amenés lentement par le sfumato ou par d’insensibles modulations.
Le timbre général reste toujours dans le froid, la tonalité dans les terres.
Il naît de ce travail une sorte de dynamisme encore obscur et une ambiguïté que la technique même que le peintre utilise rendait inévitable.
Les toiles de 58, par exemple, s’apparenteraient assez bien à des paysages romantiques, crevés d’éclaircies dans des lointains flous et situés avec imprécision, la limitation de la palette jouant ici le rôle que les bitumes jouaient ailleurs.

Cette manière se prolonge pendant trois ans et va s’atténuer puis s’estomper pour laisser place à sa plus heureuse période, celle de la peinture que Pierre Igon fait à présent.
Mais ce sont des années qui comptent pour l’artiste car, à côté de son travail quotidien intense, il présente ses toiles au public au cours de plusieurs expositions qui obtiennent un certain succès.
C’est ainsi qu’en 1958, M. Gaston Poulain, conservateur du Musée Goya de Castres, pouvait écrire de lui dans « Les Lettres Françaises » qu’il était « un très beau peintre, de la race des Braque et des Rouault... Les puzzles et autres petits jeux ne sont pas du tout son affaire. Il est noir, ardent, plus qu’ardent, passionné. Ses harmonies sont sourdés et pleines à la fois de réserve et d’envolée. Sa pâte est sombre, d’une exceptionnelle richesse ».

À cette appréciation faisait écho la presse parisienne, lorsque, en janvier 1959, Pierre Igon faisait avec les peintres Jousselin, Lindström et Pellotier une exposition à la Galerie Breteau, rue Bonaparte.
"Arts" signalait cet artiste qui « semble avoir cherché à échapper à la facilité », tandis que "Les Beaux-Arts de Bruxelles" vantait ses « solides organisations plastiques » et que "Le Monde" notait avec pertinence qu’il « adopte des motifs de structure très personnelle, malaisément définissable, où l’intersection de droites ou plutôt d’orientations joue un rôle important ».

C’est alors qu’on le voit se dégager peu à peu des chemins trop connus de cet expressionnisme et accéder à cette peinture somptueuse qu’on le voit faire maintenant. Ce qu’il garde de ses toiles précédentes, ce n’est pas l’élément dramatisant de la lumière qui, comme dans tout expressionnisme, est toujours un peu grandiloquente, (ne serait-ce que parce qu’elle force vers la dramatisation) mais cet élément dynamique qu’il découvre ; ce n’est pas cet impressionnisme jouant d’un brouillard sournois et séduisant qui nappe et éclaire la pénombre lui-même, il ne tirera, mais en le poussant dans tout sa richesse, qu’une certaine façon d’utiliser la pâte, en ne lui faisant plus jouer un strict rôle « luministe » mais en lui donnant aussi sa pleine valeur en tant que matière et surface colorée.

L’allusion figurative disparaît totalement au bénéfice d’une autonomie émotive purement non-figurative, une plus grande liberté pénètre dans la toile, à la fois dans la construction et dans la touche qui rend compte beaucoup plus intensément de la présence du peintre.
La distance entre l’artiste faisant et l’œuvre faite tend à se réduire. Igon, en accord en ceci avec les tendances les plus actuelles de l’art, veut que l’acte de peindre, le geste, soient de plus en plus lisibles dans l’œuvre, sans que ce geste se confonde pour autant avec les formes du hasard incontrôlé ou la pure anarchie, comme c’est le cas trop souvent. Et il se produit ainsi une sorte d’inversion dans la structure de la toile.

L’espace ne se creuse plus dans la surface, avec son jeu d’arrière- plan suggérés, il se développe à partir d’elle, dans toute sa présence, dans son autonomie et sa splendeur. On ne peut d’ailleurs plus véritablement parler d’espace pour cette peinture, comme pour toute
peinture authentiquement non-figurative, car il est évident qu’ici l’espace n’est plus une composante de l’oeuvre, une notion que l’on peut séparer des autres composants qui seraient la lumière, la couleur, la matière, la construction etc... puisque l’ouvre se
présente au spectateur comme une globalité qui contient à la fois, fondus, indissolublement liés, son espace., sa matière et sa forme. Et qu’elles appellent du spectateur non plus une adhésion hétérogène, périphérique ou marginale, trop souvent éloignée de l’aperception esthétique mais une aperception tout court, une co-naissance, ce que Worringer appelle, d’un mot quasi intraduisible, 1’ « Einfühlung».

Ainsi, à partir de 1960, Pierre Igon atteint dans sa peinture à une plénitude que 14 ans d’un travail en acharné et solitaire nous laissaient pressentir. En même temps que son graphisme se libère, on le voit introduire dans ses toiles des couleurs chaudes, des ocres, des orangés, qui ont la chaleur du feu.
Son sens exact de la proportion (c’est un des rares peintres à travailler ses œuvres dans des dimensions qui semblent irréductibles) la force de sa touche alliée à une sensibilité aiguë de la couleur s’exaltent dans un lyrisme à la fois pudique et puissant.

C’est aussi une époque de grande création et de présentations successives au public. Le Prix Charles- Malpel, en 1960, vient récompenser le peintre, et ses œuvres exposées dans les grandes manifestations provinciales sont toujours. remarquées. Puis, eu 1962, le Prix « Signatures Provinciales », qu’il remporte dans la catégorie Non-Figuratifs ; son exposition, avec le Bordelais Pistre, à Paris, Galerie du Damier et, enfin, last but not least, « le Grand Prix de France des Prix Signatures », qui vient de lui être décerné récemment. La Presse artistique découvre ce peintre effacé qui préfère accomplir sou œuvre à l’écart plutôt que de fréquenter les coteries en place.

« Arts » le signale comme « un des meilleurs jeunes abstraits actuels ».

Pour l’amateur et le critique, l’artiste semble retrouver un monde lourd de significations qui nous concernent. Mais ce n’est pas son moindre mérite que, étant parti d’une immanence qui paraissait subie, d’un monde fatal dans lequel la conscience d’un homme nous semblait enchaînée, il ait atteint une sorte de permanence révélée d’un monde plus brûlant, que l’artiste possède et habite avec une lucidité et une joie certaines.
S’il est vrai, comme l’a dit Scharsow, que « l’art est une explication de l’homme avec la nature » (et il faut ici comprendre nature dans un sens moins étriqué que ne le veut le peintre figuratif), on peut dire que l’œuvre de Pierre Igon est la démonstration exemplaire de la formule.

Encore que son œuvre se veuille éloignée de toute catégorie et de tout symbolisme et seulement ancrée en plein dans le pictural, on ne peut s’empêcher de remarquer à quel point son cheminement pourrait correspondre au tracé d’un parcours que je qualifierais volontiers d’initiatique si le mot n’était de nos jours aussi dévalué. Une sorte de parcours à la découverte des archétypes et des symboles et d’une incarnation de ceux-ci dans les éléments.

Parti d’un monde ossifié et minéral, qui semblait refuser l’existence, on l’a vu établir dans ses toiles des textures formelles qui n’étaient pas sans analogie avec la Terre, puis (avec les flous de sa période expressionniste) avec l’Eau et l’Air. C’est maintenant un dialogue avec le Feu, un feu qui est aussi l’instinct créateur, dans toute sa grandeur et ses lacunes.
Un feu souterrain, mais qui illumine l’ouvre de ses reflets, de sa chaleur.

Henry Lhong, 1963